JIDV 2 (Tome 1, numéro 2 - Janvier 2003)
Auteur
Erik De Soir, Ecole Royale Militaire - Département des Sciences du Comportement
Centre pour l'Étude du Stress et du Trauma
Psychologue - Psychothérapeute - Major d'Infanterie
Vice-Président de l’Association de Langue Française pour l’Etude du Stress et du Traumatisme
30, Avenue de la Renaissance - B-1000 Bruxelles, Belgique
Résumé
La reconnaissance des troubles psycho-émotionnels des intervenants des services de secours est relativement nouvelle en Europe. L’objectif principal de ce chapitre est de tenter de créer une image réaliste du terrain et du monde du travail très spécifique des intervenants en situation d’exception avant de discuter des moyens à mettre en place afin de mieux pouvoir gérer leur détresse émotionnelle. Nous discuterons des techniques appropriées pour assurer le soutien psychologique des intervenants avant, pendant et après une intervention choquante. Dans ce texte, nous distinguerons différentes catégories de victimes (primaires, secondaires et tertiaires) et différentes catégories de prévention de problèmes post-traumatiques primaires, secondaires et tertiaires.
Mots-clés
Débriefing psychologique – assistance psychologique – séquelles psychotraumatiques – intervenants – découplage émotionnel – récupération psychologique
Introduction
L |
a dernière décennie l’accompagnement psychologique des intervenants des services de secours a reçu de plus en plus d’attention de la part des médias et du monde scientifique. Le point culminant de cette attention, accordée aux sauveteurs en situation d’exception, a vraisemblablement été atteint durant la période immédiatement après les attentats terroristes sur les villes de New York et de Washington du 11 septembre 2001. Plus personne ne pouvait rester insensible aux images cruelles de victimes grièvement blessées et traumatisées ni à la détresse psychologique des intervenants étant en même temps victimes et sauveteurs. Dans d’autres pays partout au monde les intervenants en situation d’exception – sapeurs-pompiers, ambulanciers, médecins ou infirmières urgentistes, e.a. – ont trouvé dans ces images la preuve de ce qu’ils soupçonnaient depuis longtemps, jusqu’à ce jour-là plutôt appartenant au domaine de la connaissance implicite de chaque intervenant : pour les acteurs de l’urgence collective, tout comme pour leurs victimes, il y a maintes dangers psychiques présents sur le terrain. Il existe des situations de crise, où l’aide et les secours aux victimes peuvent devenir choquants, voire même traumatisants, et où il faudra une assistance psychologique après-coup. Pourtant, la reconnaissance de ces problèmes d’ordre psycho-émotionnel des intervenants des services de secours est relativement nouvelle en Europe. Aux Etats-Unis, ce sont surtout Mitchell (1981 ; 1983), Mitchell & Bray (1990) et Mitchell & Everly (1993), et en Australie, Raphaël (1986) qui ont mis en évidence ce genre de problèmes ainsi que des techniques d’intervention, échelonnées dans le temps, pour remédier aux séquelles psychotraumatiques des intervenants en temps de crise ou d’urgence collective. Les publications de Dyregrov (1989) et Dyregrov et. al. (1996) furent les premières en Europe. Dans tous ces textes, les techniques d’aide psychologique immédiate et post-immédiate sont communément appelées par leur dénominateur commun : débriefing psychologique ou critical incident stress debriefing (le débriefing après incidents critiques).
L’objectif principal de ce chapitre est de tenter de créer une image réaliste du terrain et du monde de travail très spécifique des intervenants en situation d’exception avant de discuter des moyens à mettre en place afin de pouvoir mieux gérer leur détresse émotionnelle pendant et après des interventions à potentiel traumatisant (interventions traumatogènes). Depuis longtemps, à travers de nombreuses catastrophes macro- et microsociales, les intervenants eux-mêmes sont restés trop souvent à l’écart de toute forme de soutien psychologique et n’ont pu bénéficier de l’attention portée aux victimes directes et leurs proches. Cette contribution vise à donner une reconnaissance de la souffrance psychique des sauveteurs, une (re)mise en valeur de leur travail parfois inhumain et un respect de l’homme ou la femme derrière l’uniforme du secouriste.
Nous discuterons aussi des techniques appropriés pour assurer le soutien psychologique des intervenants en situations d’exception – avant, pendant et après une intervention choquante – sans vouloir entamer la discussion de leur effectivité en matière de prévention de traumatismes psychiques. Pourtant nous insistons sur le fait qu’il faut tout d’abord distinguer les différentes catégories de victimes - et se demander dans quelle mesure il y a eu traumatisation – ainsi que l’éventail des interventions possibles dans l’immédiat et le post-immédiat, avant de lancer toutes les initiatives d’aide et de soutien psychologique. Les dernières années nous avons démontré à plusieurs reprises que ces dernières années le débriefing psychologique a été administré de façon arbitraire à une multitude de victimes, toutes dans une mesure ou une autre, atteintes de stress qualifié comme étant traumatique, et ce, par une multitude d’intervenants psychosociaux, professionnels ou non, à différents moments.
Dans ce texte, nous distinguerons différentes catégories de victimes et différentes catégories de prévention de problèmes post-traumatiques, à savoir : d’une part, les victimes primaires, secondaires et tertiaires, et, d’autre part, la prévention primaire, secondaire et tertiaire. Le cadre conceptuel derrière cette sous-division, donne lieu à trois types de traumatisation, respectivement : la traumatisation directe, la traumatisation indirecte et la traumatisation vicariante.
La victime primaire, traumatisée de façon directe, est la victime ayant vécu une situation choquante à potentiel traumatisant (traumatogène) et dont la vie en reste bouleversée. La victime primaire a vu la mort en face, de façon directe ou indirecte. Effrayée, totalement bouleversée et pétrifiée, ses croyances de base par rapport à la prévisibilité, l’honnêteté, le contrôle, la sécurité, la confiance et le sens (de la cohérence) du monde étant ébranlées de façon soudaine et brusque. Elle présente les symptômes spécifiques des résidus de stress aigu (parfois allant de pair avec des reviviscences à caractère dissociatif) ou de stress post traumatique. Tous ceux appartenant à l’entourage direct de la victime primaire sont considérés comme des victimes secondaires (potentielles) ; ils vivront vraisemblablement une traumatisation indirecte qui provoquera des troubles spécifiques de stress traumatique secondaire (e.a. traumatisation par le biais de l’identification avec la victime primaire ou atteinte de propres assomptions de base à travers le contact avec la victime primaire) ; nous pensons e.a. aux membres de famille, aux proches, aux collègues et aux ami(e)s des victimes directes. Finalement, à moyen et long terme les intervenants des services de secours et les acteurs de l’aide psychosociale sont considérés comme des victimes tertiaires (potentielles) et subiront éventuellement un processus de traumatisation vicariante sur base des contacts intenses et parfois multiples avec les victimes primaires et secondaires.
Dans le cas où les intervenants seraient eux-mêmes victimes d’un traumatisme psychique, suite à la gravité de certaines interventions dans lesquelles ils peuvent être blessés ou confrontés directement à (l’effroi de) la mort eux-mêmes, ou confrontés à des collègues morts ou grièvement blessés, nous les considérerons comme étant des victimes directes.
Dans ce chapitre, nous focaliserons aussi sur les problèmes des intervenants, en principe toutes victimes tertiaires (sauf durant des interventions où ils vont jusqu’à s’identifier avec leurs victimes et/ou certains deviendront victime secondaire), et aidés par des activités de soutien diverses pouvant être vues comme des formes de prévention primaire et secondaire. Il est cependant clair qu’un même groupe d’intervenants peut compter des victimes primaires, secondaires et tertiaires dans ses rangs (nécessitant donc différentes formes d’aide et de soutien : cf. infra).
Nous appelons la prévention primaire – ayant pour but la prévention de troubles émotionnels et psychologiques dans le sens propre de terme - toute activité qui vise à 1) préparer les intervenants au travail de terrain dans des situations d’exception ; 2) élaborer les structures de prise en charge et de gestion, dans l’immédiat (endéans les quelques heures après l’événement traumatogène) et le post-immédiat (endéans les quelques jours après l’événement traumatogène), des intervenants en temps de crise ; 3) assurer le premier soutien émotionnel et psychologique immédiatement après une intervention à potentiel traumatisant. Le désamorçage émotionnel et psychologique immédiatement après-coup (voir infra) est donc toujours vu comme étant une intervention de prévention primaire. La prévention secondaire – ayant pour but de réduire la prévalence de troubles émotionnels et psychologiques de cas établis et dans un stade de développement précoce - regroupe toutes sortes d’interventions de soutien et d’aide émotionnelle visant à 1) détecter rapidement des problèmes d’ordre post-traumatique ; et, 2) intervenir rapidement, au bon moment, de façon adéquate et avec la bonne technique, individuellement ou en groupe, afin de minimiser les conséquences de l’impact à potentiel traumatisant. Nous considérons les multiples formes de débriefing psychologique – que nous appellerons session de découplage émotionnel et psychologique (découplage tout court) - comme étant des techniques de prévention secondaire par excellence (à condition d’être exécutée par des intervenants psychosociaux formés pour ce genre d’interventions et de respecter les modalités d’application). La prévention tertiaire est plutôt d’ordre curative et relève du domaine de la psychothérapie et/ou de la psychiatrie. Si les mesures de prévention primaire et/ou secondaire n’ont pas eu l’effet voulu, pour une raison ou une autre (e.a. prémorbidité, facteurs aggravants, impact extrême, accumulation d’impacts traumatisants, mauvaise application de techniques de soutien) une approche thérapeutique deviendra nécessaire afin d’assurer une prise en charge professionnelle en profondeur et de moyenne ou longue durée.
Une première partie de ce chapitre traite la façon dont les intervenants eux-mêmes vivent des interventions émotionnellement choquantes à potentiel traumatisant, sur le terrain et immédiatement après. Cette première partie apprend qu'il est indispensable de tenir compte du soutien naturel présent dans chaque service (notamment le soutien de « collègues pour collègues ») de secours lors de l'élaboration d’un système d'assistance psychologique après incidents critiques. Toute assistance psychologique pour les intervenants devrait d'ailleurs déjà commencer sur le terrain même. De plus en plus il devient clair que surtout les problèmes d’hyperagitation neurovégétative, pouvant provoquer des réactions de dissociation psychoforme et somatoforme sont prédictifs d’une chronification de troubles post-traumatiques (Van der Hart, Nijenhuis, et Steele, 2002, in press), ce qui voudrait dire qu’une réelle prévention de terrain deviendrait possible par des simples actions de soutien ayant un effet calmant sur les victimes traumatisées. Dans ce chapitre l'intervention choquante à potentiel traumatisant est vue comme un « puzzle » multidisciplinaire qui devra être reconstruit après par tous ceux ayant contribué aux activités de sauvetage et de secours. Plusieurs exemples concrets illustreront une approche possible. Une deuxième partie de ce chapitre est consacré à l'introduction du découplage émotionnel et psychologique, une forme de débriefing psychologique par les pairs et superviséepar des professionnels (prévention secondaire). Ce débriefing du stress à potentiel traumatisant, pouvant être appelé stress traumatogène, idéalement précédé par un désamorçage émotionnel et psychologique (prévention primaire), est organisé comme une forme de soutien mutuel et d'assistance psychologique après-coup, fourni par des collègues bien entraînés et supervisés par des professionnels (psychiatres ou psychologues et sapeurs-pompiers eux-mêmes). Une troisième partie du chapitre focalise sur les types d’interventions précoces et différées par des « pairs supervisés » - des collègues formés pour constituer des équipes d’aide collégiale urgente, organisés dans un réseau d’Equipes de Gestion de Crises (EGeC) comme par exemple les les Fire-fighter & Emergency Medical Stress Teams (FiST) belges – et les objectifs de leurs actions. Une dernière partie reprendra des explications détaillées par rapport à la création du réseau d’intervention des FiST, ceux-ci étant aussi le sujet de nombreuses autres publications (cf. infra). Après lecture de cet article le lecteur comprendra pourquoi l’initiative de créer une « Association Européenne de Psychologues Pompiers » (AEPP) – « European Society for Fire Psychology » (ESFP).
Les événements à potentiel traumatisant dans le milieu des sapeurs-pompiers et des acteurs de l’aide médicale urgente
Notions préliminaires sur le traumatisme psychologique
Dans les paragraphes qui vont suivre nous illustrerons la diversité des effets d’événements à potentiel traumatisant sur les sapeurs-pompiers et les acteurs de l’aide médicale urgente. Par un événement émotionnellement choquant, nous entendons donc (voir ci-dessus): un événement, dans le sens large du terme, qui fait violemment prendre peur, émeut et qui, par son comportement soudain ou inattendu, peut sérieusement troubler l’équilibre émotionnel et cognitif de l’individu concerné. Les exemples sont, entre autres, l'annonce d'un décès douloureux et inattendu d'un membre de la famille ou d'une connaissance, la vue de blessés sérieux ou de morts et la vue ou la participation à un accident de voiture.
Un événement à potentiel traumatisant (traumatogène), en revanche, est un événement qui répond aux quatre critères suivants: (1) l'événement est soudain et inattendu; (2) cela donne un sentiment d’extrême impuissance, d'affolement et/ou de colère; (3) l'événement est lié à des émotions fortes (e.a. anxiété, honte, culpabilité, chagrin) et des sentiments de peur intense, voire même d’effroi; (4) il confronte les victimes de façon directe ou indirecte avec le monde des morts (d’où: confrontation avec sa propre mort) ou une atteinte sérieuse à l'intégrité physique et psychique de soi-même et/ou de l'autre (d’où les sentiments de pénétration et d’intrusion dans son propre monde, et vécu comme un écrasement du moi) menant souvent à un état post de stress post-traumatique.
Un événement émotionnellement choquant peut donc également être traumatisant, mais ceci n'est pas nécessairement vrai. Les événements traumatisent quand ils impliquent un contact plus ou moins direct avec la mort, allant de pair avec un écrasement de l’image de soi (et du moi de la victime) et ébranlant les fondements de l'homme et de sa vie. Ils s'écartent des expériences habituelles de notre monde normé et causent chez tous ceux qui en sont victimes un dommage (biologique, psychologique, émotionnel, spirituel et cognitif) certain. Les événements (à potentiel) traumatisant(s) sont donc des événements « hors catégorie » », parfois naturels et en fait personne ne peut vraiment se mesurer avec ceux-ci. Se remettre d'un événement traumatisant que peut être un processus particulièrement douloureux et long. En dehors du sentiment d'être troublé, blessé et pénétré dans sa propre sécurité, suivent des sentiments complexes et souvent destructifs d'incertitude, de faute, de culpabilité, de peur, de honte et de doute. Les événements traumatisants suscitent chez les victimes des questions et des suppositions de base concernant leur amour-propre et sur l'ordre du monde. Le désarroi émotionnel fait désirer profondément les victimes d'événements traumatisants à la stabilité et à un sens envers le monde autour d'eux et leur propre rôle dans celui-ci.
Les intervenants, eux acteurs des services de secours, des services d’ordre et de l’aide médicale urgente, mettront incontestablement en question leur rôle de « sauveur » et ils commenceront sérieusement à douter de leurs capacités. Malgré cette aspiration à la quiétude - qui peut souvent être trouvée dans la mesure où l'événement traumatisant, via une reconstruction détaillée, peut trouver une explication ou le départ d'une assimilation du trauma -, les victimes d'un événement traumatisant se remémorent souvent des souvenirs non désirés de l'événement en question. Les souvenirs sont alternativement présentés comme, d'un côté des pensées indésirables qui incitent à se tracasser ou à ruminer et, de l'autre côté, des souvenirs obsessionnels, intrusivement profonds. Ces souvenirs spontanés, qui reviennent sous la forme de sensations et d’images préverbales et non-intégrées, sont la conséquence de bon nombre d’événements péritraumatiques et de dissociation ; ils forment, en alternance avec les réactions d'évitement et de négation, la signature du traumatisme psychologique, appelé état du stress post-traumatique (post- traumatic stress disorder ou PTSD), tel qu’il a été exprimé pour la première fois en 1980 dans le Diagnostic and Statistical Manual for Mental Disorders III (APA 1980, 1987, 1994).
Dans le DSM-IV le syndrome du stress post-traumatique est décrit en fonction d’une série de critères diagnostiques. Suivant le premier critère, le critère A, il faut une exposition à un événement traumatique. Le caractère traumatique de l’événement réside dans l’interprétation objective et subjective que l’individu se fait de l’événement. D’un point de vue objectif, il faut que le sujet ait vécu, été témoin ou confronté à un ou plusieurs événement(s) durant le(s)quel(s) des personnes ont pu mourir ou être grièvement blessées, ont été menacées de mort ou de graves blessures ou encore durant le(s)quel(s) l’individu a vu son intégrité physique ou celle d’autrui menacée. Outre ce point objectif, de façon subjective l’individu doit avoir réagi à l’événement par une peur intense, un sentiment d’impuissance ou d’horreur.
Au niveau de la symptomatologie, l’état de stress post-traumatique est caractérisé par trois clusters de symptômes : (1) le critère B reprend une catégorie de symptômes de réexpérience intrusive de certains aspects de l’événement (souvenirs, pensées, rêves, flashbacks) ; (2) le critère C reprend une catégorie de symptômes de négation et d’évitement (e.a. éviter des aspects et/ou des pensées à l’événements, engourdissement émotionnel, « oubli » motivé) ; et, (3) le critère D une catégorie de symptômes d’hyperactivation (hyperarousal) neurovégétative (niveau d’irritabilité accru, réactions de sursaut exagérées, troubles de sommeil, tachycardie, e.a.). Finalement, dans un critère E, le DSM stipule que les symptômes cliniques de l’état du stress post-traumatique devraient avoir une grande répercussion sur le fonctionnement social et/ou professionnel de l’individu traumatisé.
Le DSM-IV impose aussi des limites de temps, certains irréalistes certes, pour l’état de stress post-traumatique et l’état de stress aigu. Si les symptômes repris dans les critères B, C et D (ci-dessus) restent présent entre deux semaines à un mois, allant de pair avec des symptômes de dissociation, le DSM permet de poser le diagnostic de l’état de stress aigu dont certaines études pensent qu’il est un précurseur logique de l’état de stress post-traumatique. Si les symptômes restent présent durant un mois (et plus), le diagnostic de l’état de stress post-traumatique peut être posé. Notons que même une forme différée, où les symptômes apparaîtraient seulement après six mois, est prévue dans le DSM-IV.
Dans cet article, non n’explorerons pas plus en détail les autres troubles post-traumatiques (repris dans le chapitre de DSM-IV sur les troubles de l’angoisse) – état de stress aigu, état de stress post-traumatique différé, état de stress post-traumatique complexe, e.a. – et dissociatifs (repris dans le chapitre du DSM-IV sur les troubles dissociatifs) – fugue dissociative, amnésie dissociative, trouble dissociatif de l’identité, e.a. – puisque de part nos expériences de terrain et cliniques nous contestons quelque peu cette classification purement phénoménologique expliquant le traumatisme psychologique comme un « menu chinois » de symptômes et de réactions, passant en quelque sorte à côté de la psychologie du trauma.
Des intervenants de terrain ont-ils besoin d’une aide ou d’une prise en charge ?
Celui qui choisit pour travailler chez les sapeurs-pompiers ou dans l’aide médicale urgente peut s'attendre à être, tôt ou tard, confronté à un événement émotionnellement choquant à potentiel traumatisant, tout comme dans d'autres métiers à risques où il est question d'un choix clairement professionnel conscient ; pensons par exemple au personnel des services d’ordre, transporteurs de fonds, gardiens de prison, industrie à risque et au militaires d’unités opérationnelles. Pourtant, devoir travailler avec des victimes vivantes, gravement blessées ou mortes par le feu, ou victime d'un grave accident de voiture, d'une catastrophe naturelle, d'un délit de violence, d'une fusillade, etc., demande un bon accompagnement psychologique. Plusieurs études de terrain (De Soir, 1995, 1996, 1997a ; De Soir, 1997b, 2000) montrent qu’à peu près un pompier ou ambulancier sur dix n'aurait jamais digéré un précédent choc traumatique pendant une intervention. Les effets, à court et à long terme, des stress soudains et intenses non-intégrés et s'accumulant lentement, semblent vraiment détériorant pour le bien-être psychique et physique de ces intervenants. Sans réellement s'en rendre compte, ils reçoivent de sérieux coups du point de vue médical (biologique ou corporel), psychologique, social (familial) et spirituel (existentiel). Les expériences péritraumatiques, où durant une opération ou une intervention à potentiel traumatique il y a souvent question d’une dissociation entre les niveaux sensori-moteur (biologiques), émotionnel et cognitif, semblent pathogènes à long terme.
Ces dernières années, nous avons étudié les problèmes d’ordre émotionnel et psychologique parmi le personnel des services de secours en Europe (Belgique, Pays-Bas, France, Luxembourg, Italie, Suisse et Tchéquie), aux Etats-Unis, en Nouvelle Zélande et en Australie. Dans ces différentes parties du monde la structure des contacts avec des groupes d’intervenants fut toujours la même : une analyse expérientielle dirigée concernant le caractère des interventions potentiellement traumatisantes, une discussion dirigée sur la pratique dans la vie réelle et une explication théorique des mécanismes péritraumatiques (voire même dissociatifs) et des phénomènes immédiats et post-immédiats des stress potentiellement traumatisants. La problématique semble être universelle : les sapeurs-pompiers et les acteurs de l’aide médicale urgente sont d ' abord « de l'action » et ensuite « de la pensée » et « de la parole » . Pourtant, une fois qu'ils commencent à parler ils semblent ventiler leurs anciennes interventions choquantes auxquelles ils n’avaient pas encore, jusqu’à ce jour-là, prêté beaucoup d’attention. Il s’agit pour eux d’interventions traumatogènes qui n’ont jamais été intégrées ni travaillées émotionnellement. Chaque nouvelle intervention pénible, à potentiel traumatisant, peut déclencher ces « anciens résidus traumatiques ». C’est seulement après les parties psycho-éducatives des sessions d’information et de sensibilisation que ces intervenants semblent comprendre ce qui leur est arrivé et pourquoi ils ont réagi tel qu’ils l’ont fait au moment même. Pendant ces dizaines d'exercices de corps avec des sapeurs-pompiers et les ambulanciers, il nous est toujours apparu indispensable d’écouter et de prendre en charge ces stress opérationnels à potentiel traumatisant, mais aussi de connaître l'essentiel du monde des secours et de l’aide médicale urgente (ou idéalement d'en faire partie).
L’intervenant de terrain ne supporte pas de «professionnels » (e.a. psychologues et psychiatres) étrangers à leur monde et ne veut pas être considéré comme étant « une victime traumatisée ». L'assistance d'un psychiatre, d’un psychologue, d’un(e) thérapeute ou d’un intervenant social à une victime, donc l'assistance à partir d'une position de force par les connaissances théoriques du diplômé et de « 1'expérimenté » ne va pas de pair avec les problèmes de stress opérationnel des intervenants. Il sera beaucoup plus important de considérer les membres du groupe de sapeurs-pompiers et des acteurs de l’urgence comme étant des égaux, pour ainsi, après avoir reçu un mandat utilisable basé sur l'égalité, essayer de ranimer une conversation sur les interventions traumatisantes. L’intervenant considère la marge entre échouer et réussir, entre sauver et ne plus savoir sauver et donc entre « être un héros » ou « se sentir également victime » comme étant très petite.
Le besoin de pouvoir rester ensemble et parler, dans une ambiance de confiance, après une intervention éprouvante et potentiellement traumatisante, est grand ; chacun veut avoir la possibilité de s’exprimer dans un contexte de compréhension et de respect mutuel. Dans ces premiers entretiens de ventilation (appelés « stress buster sessions » ou « vent sessions » dans les milieux d’intervenants anglo-saxons), l’accent ne semble pourtant pas la décharge ou la « purge » émotionnelle mais bien – et cela en premier lieu - la récupération physique (corporelle) de chaque intervenant (vêtements propres, nourriture, boissons, abris, e.a.) et un premier éclaircissement bref du rôle de chacun dans l’intervention. Pendant ce premier contact de récupération émotionnelle et de récapitulation cognitive (appelé defusing dans la littérature anglosaxonne concernant le critical incident stress management) les intervenants répondent essentiellement aux questions suivantes (et ce dans une ambiance informelle et peu structurée, autour d’une tasse de café ou d’une boisson fraîche) : qu’est-ce que j’ai fait (ou pu faire) ? que s’est-il au juste passé ? comment je m’en suis sorti ? comment est-ce que je vais ? est-ce que je voudrais, après une période de repos, revenir plus en détail sur cette intervention ? de quelle aide ou de quel soutien aurais-je besoin maintenant (que faut-il avant de me sentir mieux) ? Pas question d’explorer les émotions dans ce stade ou de poser des questions du style « quel était le moment le plus douloureux de cette intervention ? ». Entre temps, il y a assez de recherches scientifiques démontrant qu’une telle approche risquerai plutôt de nuire (de re-traumatiser) à la personne que de contribuer à son rétablissement. Pendant ce premier contact immédiatement après-coup, il n’y pas encore question de reconstruire l’intervention de façon détaillée, cela se fera dans les jours suivants après une récupération et un repos physique. Nous pensons que la verbalisation et l’exploration détaillée et précoce des émotions couplées à l’événement risque d’aggraver l’état de l’intervenant choqué et/ou « traumatisé ». Nous pensons e.a. au modèle de Seigel (1999) concernant la « fenêtre de la tolérance » (littéralement et librement traduit de “window of tolerance”) correspondant aux limites inférieure et supérieure d’excitation corporelle et neuro-végétative à ne pas dépasser en travaillant avec des victimes choquées et/ou traumatisées.
Seigel stipule : “Internal states outside the ‘window of tolerance’ are characterized by either excessive rigidity or randomness. These states are inflexible or chaotic, and as such are not adaptive to the internal or external environment. (...) In states of mind beyond the window of tolerance, the prefrontally mediated capacity (cognitive processing) for response flexibility is temporarily shut down. The ‘higher mode’ of integrative (cognitive) processing has been replaced by a ‘lower mode’ of reflexive (sensorimotor) processing” (D.J. Seigel, 1999, pp. 254-255)
Lors du franchissement de ces limites l’individu perdrait ses capacités de traitement de l’information émotionnelle et cognitive. Le « switch off » des structures supérieures du cerveau – et e.a. des différentes fonctions du cortex – rend ainsi impossible toute synthèse, personnification et intégration de l’événement traumatogène. L’individu « traumatisé » retombe à un niveau de réflexes et/ou d’instincts animaux et risque d’être exposé à une re-victimisation et re-traumatisation pendant des activités de soutien basées sur une approche cathartique ou abréactive.
Le trauma peut donc survenir une deuxième fois quand le système de défense psychique se fracture de nouveau, suite à une intervention trop précoce, et que l’intervenant a de nouveau l’impression de ne plus se savoir protéger de stimuli menaçant son intégrité physique et psychique.
Une première rencontre entre intervenants comprendra donc essentiellement des aspects de reconstruction et de restructuration cognitive, de psycho-éducation, de légitimation et de normalisation des réactions initiales. Même si les émotions ne sont pas encore explorées plus en détail, certains s’exprimeront déjà immédiatement en montrant leur détresse émotionnelle et leur désarroi face aux blessés et au morts auxquels ils viennent d’être exposés. Il va de soi que « l’oreille qui écoute » offre aussi un premier soutien émotionnel, mais sans entamer une démarche de thérapeutique ou d’exploration émotionnelle. Les émotions qui viendront durant ces premiers moments seront : l'impuissance souvent envahissante, le sentiment vraiment haineux d'abandon, la tristesse paralysante envers la peine humaine (souvent reconnaissable) des victimes (surtout s’il s’agit d’enfants), le sentiment de culpabilité intense de n'avoir rien pu faire ou d'en avoir fait trop et la colère que suscite tout cela.
Dans d’autres paragraphes ci-dessous nous continuerons encore la discussion de certains mécanismes fonctionnels, utilisés inconsciemment par les intervenants, pouvant être vus comme adaptatifs sur le terrain, mais pathogéniques à long terme.
Le problème des intervenants semble donc se situer au niveau de l’élaboration et l’intégration des différentes sensations, liées aux interventions traumatogènes, après le retour à la caserne ou dans le service et certainement à plus longue échéance. Déjà maintenant nous prenons comme position que des entretiens psychologiques immédiats (après le retour de l’intervention) et post-immédiats (durant les jours qui suivent), à conditions d’être bien menés et ce au bon moment, pourraient ici faire une réelle différence.
Le puzzle potentiellement traumatisant d’une intervention multidisciplinaire
Avant d’entamer leurs opérations de secours, les intervenants en situation d’exception sont passés à travers toute une chaîne de réactions visant à mobiliser les ressources de leurs corps (cf. Syndrome Général d’Adaptation connu des modèles de stress aigu et chronique). Cette agitation corporelle est nécessaire pour rester, le plus longtemps possible, opérationnel et vigilant durant l’intervention. Cependant, c'est celle-ci même qui, pendant des interventions traumatisantes, est aussi responsable d'une chute d'attention pour certains stimuli - comme le rétrécissement du champ de perception qui est un des mécanismes dissociatifs les mieux connus – allant souvent de pair avec une « hyperattention » pou d’autres stimuli, et qui peut amener des faillites humaines. Les sapeurs-pompiers ou les ambulanciers refusent cependant d'admettre ces données. C'est contre leur code d'honneur. Ce phénomène de rétrécissement de l'attention est connu dans la littérature scientifique sous le nom de l'Easterbrook-claim (Easterbrook, 1959) : l'agitation physiologique d'un événement émotionnellement chargé entraîne un rétrécissement de l'attention (narrowing of attention). Cette diminution de l'attention mène finalement à une diminution des capacités de prendre les éléments d'information clés d'un environnement où un événement prend place (Easterbrook, 1959 ; Eysenck, 1982). L'intervenant impliqué peut donc difficilement arriver seul à une reconstruction de toute l'intervention. Celle ci est pour lui comme un grand puzzle dont il n'aurait qu'un nombre restreint de pièces, ce qui augmente sa difficulté d'arriver à une image globale de l'intervention. Pourtant, mise à part la récupération émotionnelle, la restructuration cognitive (donc la bonne compréhension de l’intervention) est une condition sine qua non pour arriver à un développement sain. De plus, par manque de bonnes informations, la fantaisie autour d'un événement traumatisant est souvent plus grave que la réalité.
Le problème est surtout que, d'un côté les scientifiques proposent que les événements hautement chargés en émotion diminuent a priori les souvenirs (Kassin, Ellisworth & Smith, 1989) et que, de l'autre côté, certains chercheurs prétendent le contraire: les événements émotionnellement choquants mèneraient à des souvenirs plus détaillés (Christianson & Loftus, 1990). Par exemple, les études sur le weapon focusing (Cutler, Penrod & Martens, 1987 ; Kramer, et. al., 1985 ; Maass & Kohnken, 1989)montrent qu'un stress déterminé induit les objets comme armes à feu ou couteaux, pendant l'usage des méfaits et peut exiger toute l'attention de l'homme et donc améliorer le niveau des détails et sa minutie, ceci au détriment d'autres détails de la situation donnée.
Il arrive en effet souvent, pendant les sessions de récupération émotionnelle ou debriefings psychologiques, que les intervenants impliqués décrivent l'événement traumatisant comme quelque chose qui arrive comme dans un film ou un clip vidéo, invraisemblable et plein de signes de non-connaissance de la réalité. Le bébé blessé est d'abord vu comme une poupée sur le siège arrière, le visage d'une connaissance s'y reconnaît beaucoup plus tard, une fois l'intervention et le travail douloureux terminés. Ici, nous retrouvons de nouveau l'intervention du mécanisme de choc – expériences tunnel (tunnelvision), distorsions perceptuelles, amnésies, analgésies, e.a. - qui fait que les intervenants impliqués restent « opérationnels » pendant le travail potentiellement traumatisant mais qu’ils perdent leurs capacités de synthèse, de personnification et d’intégration de leurs expériences. L'organisme humain ne se laisse pas aller à une « perte totale ».
Les intervenants impliqués l'expriment par après comme « travailler en pilotage automatique ». Donc, la plupart des opérations pendant les premiers moments d'une intervention traumatisante se font automatiquement, instinctivement, appris par exercice, avec peu de paroles, dirigés, invraisemblables et irréels. Les enfants sont donc souvent des poupées. Les connaissances sont, à ce moment « étrangères », les blessés ou les morts sont déshumanisés en partie via l 'humour noir, pour pouvoir garder une certaine distance. Les émotions qui vont de pair avec ses expériences n’arriveront qu’après quelques heures ou quelques jours. Il arrive toujours un moment où le pilotage automatique s'arrête. Après l'intervention, on connaît ce phénomène de «contrecoup émotionnel » ou le fait de « craquer après coup ». Pendant les longues interventions, un stimulus peut parfois déclencher l'arrêt du pilotage automatique: l'impression soudaine que la victime ressemble à un membre de la famille, un ours en peluche similaire à celui d’un de ces propres enfants, ou encore une poupée, ou tout autre stimulus qui, instantanément, perfore l'armure de l'intervenant et le confronte à nouveau avec les émotions normales de l’être humain, ce qui le fait principalement fonctionner comme un homme vulnérable. Cela ne dure naturellement pas longtemps. Une fois l'action intense derrière le dos et le danger écoulé, l'intervenant impliqué a, parfois partiellement, une vision de ce qui s'est réellement passé et de ce qu'il a fait. À partir de là commence le «trauma vidéo carrousel » : à cause du souvenir fragmenté pendant l'intervention, chaque intervenant commence à reconstituer l'intervention (voir à ruminer), en se demandant en permanence si cela n'a pas pu se dérouler autrement et si lui ou ses collègues n'avaient pas pu ou dû faire plus. Au plus, l'intervention reste lacunaire, ces questions durent et l'esprit reste occupé à ruminer l'intervention. Ici, les victimes tombent directement dans la dynamique du traumatisme psychique : remémorations continuelles et intrusives, entrecoupées de périodes de dénégation/ diminution, d'où ressortent en outre beaucoup de plaintes plus accrues, et où l'excitation corporelle reste. L'individu impliqué peut très bien s'emmurer dans la remémorisation ou dans la dénégation avec comme conséquence une augmentation du dysfonctionnement social. À ce moment on parle d'un traumatisme psychique chronifié (cf. description de l’état post-traumatique ci-dessus). Les paragraphes précédents montrent qu'un entretien de découplage émotionnel visant le bilan psychologique (débriefing psychologique) avec tous les acteurs d'une intervention de grande envergure est essentiel pour leur bon rétablissement.
L’assistance en situations de crise et l’entretien de récupération et de découplage émotionnel visant le bilan psychologique d’interventions (de grande envergure) potentiellement traumatisantes
Considérations préliminaires
L'expression d'une intervention potentiellement traumatisante, en groupe et suivant une procédure prévue à cet effet, sera appelée dans les paragraphes suivants, selon le moment auquel l’intervention à lieu, l’entretien de récupération émotionnelle et l’entretien de découplage émotionnel; ce genre d’interventions fut auparavant communément appelé respectivement defusing,debriefing psychologique ou débriefing après incidents critiques mais puisque ces dernières années toutes sortes d’interventions dans l’immédiat et le post-immédiat d’une catastrophe furent appelées débriefing, et puisque ce terme anglo-saxon n’a qu’une validité apparente très réduite, nous avons choisi une terminologie plus adéquate. L’entretien de récupération émotionnelle dans les paragraphes précédents peut être vu comme une activité de prévention primaire. L’entretien de découplage émotionnel, par contre, est destiné à la prévention secondaire auprès de victimes tertiaires (voir les notions de prévention et les catégories de victimes présentées dans l’introduction de ce texte) et devrait idéalement avoir lieu dans les jours qui suivent l’intervention.
Le découplage émotionnel est donc une intervention dirigée sur l'individu ou le groupe, dans laquelle les éléments importants d'une expérience potentiellement traumatisante entrent en ligne de compte peu après l'événement, mais quelques jours après qu’un premier entretien de récupération émotionnelle a eu lieu et les intervenants atteints de stress à potentiel traumatisant ont eu une période de rétablissement/récupération physique et émotionnelle.
Depuis peu, ce genre d’entretiens a été principalement recommandé comme la technique de gérance du stress par excellence dans les métiers à risque - intervenants sociaux dans les catastrophes, services de sapeurs-pompiers, militaires, police et services de l'ordre, etc. (Bergman & Queen, 1986 ; Dunning, & Silva, 1980 ; Griffin, 1987 ; Mitchell, 1993 ; Raphael, 1979 ; Wagner, 1979) – mais la technique fut utilisée à différentes fins et ce pour des publics cibles très différents, et parfois inadéquats (telle que les études mentionnant l’utilisation du débriefing psychologique avec des patients grièvement brûlés ; cf. De Clercq & Vermeiren, 1999).
Sans vouloir revenir sur la façon dont les différentes variantes du debriefings psychologiques, dans leurs nombreuses variantes, sont menés, et sans vouloir entamer la polémique par rapport à leur effectivité, nous voudrions quand même insister sur le fait que cette technique est essentiellement bonne si elle est, telle que prévue, utilisée avec des intervenants indirectement traumatisés (prévention secondaire de victimes tertiaires). Toute autre forme de traumatisation primaire et secondaire, et la prise en charge des victimes touchées, relève selon nous de l’aide professionnalisée, et devrait – tout comme chaque forme de prévention secondaire d’ailleurs – reposer sur des techniques et des procédures éprouvées dont l’efficacité à été étudiée au moyen d’études empiriques méthodologiquement valables (cf. études contrôlées et randomisées) utilisant les bons critères d’évaluation. Selon nous, le seul critère d’évaluation du débriefing ne devrait d’ailleurs pas se limiter à la prévention de traumatismes psychologiques ou de syndromes post-traumatiques.
D’après l’analyse fait dans les paragraphes ci-dessus, la reconstruction détaillée des interventions potentiellement traumatisantes, est vue comme étant très importante par les intervenants en question, et ce après qu’ils ont eu l’occasion de récupérer physiquement et de vivre un première période de décharge de tensions et de relaxation. Cette reconstruction détaillée ainsi que la première aide différée seront les buts importants de l’entretien de découplage et du bilan psychologique. Cet entretien a donc pour but d'adoucir les souffrances psychiques (souvent intenses) en donnant l’occasion à chacun de s’exprimer par rapport aux faits, aux pensées et aux émotions toujours couplées à l’intervention en question. Nous ne voyons cependant pas l’utilité (ni la faisabilité concrète) d’une séparation très stricte des différentes du protocole du débriefing de J.T. Mitchell (1993) chez qui le « critical incident stress debriefing » est divisé en sept phases, à savoir : (1) phase d’introduction qui vise à cadrer l’entretien et à introduire les règles de base de la rencontre ; (2) une phase des faits qui doit permettre aux participants de reconstituer l’événement afin d’arriver à un consensus factuel; (3) une phase de pensées durant laquelle les participants reviennent à leurs pensées initiales ; (4) une phase de réactions/émotions où tous sont amenés à exprimer leur vécu émotionnel ; (5) une phase de symptômes durant laquelle les signes spécifiques de détresse péri- et post-traumatique sont cadrés; (6) une phase d’apprentissage permettant la psycho-éducation des participants ; et, (7) une phase de « re-entrée » qui doit permettre à conclure la séance. Cette liste de phases nous paraît plutôt une liste d’objectifs à réaliser durant le soutien différé (postimmédiat) sur laquelle nous reviendrons dans la dernière partie de ce chapitre.
Avant de pouvoir poursuivre le métier d’intervenant et de partir sur de nouvelles interventions potentiellement traumatisantes, les intervenants devraient pouvoir se découpler émotionnellement de l’intervention choquante en question (d’où aussi l'importance des souvenirs clairs et précis). Pour des interventions où plusieurs corps de sapeurs-pompiers ou d'ambulances, ou même des groupes d'assistance plus grands, ont pris part, ceci est un problème en soi, les intervenants ne se rendent souvent pas tout à fait compte de la grandeur du cadre et du vrai contexte de l'intervention où ils furent un petit - mais souvent important - maillon. En termes d'interventions de grande envergure comme des accidents de la route, des grands incendies, des éboulements, des explosions et des autres situations de catastrophes, il est donc clair qu'une reconstruction précise est impossible si on n'en parle qu'avec les membres de son propre corps. Il est pratiquement impossible d'avoir des informations complètes sur une intervention multidisciplinaire et sur la mesure dans laquelle celle-ci peut être considérée comme réussie, si on ne tient un entretien qu'à l'intérieur et qu'avec les membres d'un même corps. L'exemple de la pratique ci-dessous permet d'illustrer ce point de vue.
Exemple
Dans un grave accident de la route où on déplora quatre morts, un pompier a devait, pendant le sauvetage, se contenter de regarder à quelques mètres de distance, comment son collègue et le personnel des services de l'aide médicale urgente administraient les soins médicaux nécessaires et devaient même passer à la réanimation d'un blessé grave. Il était là, à quelques kilomètres, prêt à intervenir immédiatement à la moindre étincelle avec une lance à haute pression. Pourtant, il se sentait superflu et inutile durant toute l’intervention. Pour lui, ce fut le pire qu'il eut jamais fait. Devoir se contenter de regarder comment les collègues, avec des moyens humains et matériels importants, se battaient pour essayer de sauver quatre personnes gravement blessés. Pendant le debriefing de groupe - où les sapeurs-pompiers, policiers, ambulanciers, service de dépannage et quelques autres services d'assistance étaient présents -, le pompier en question éclata de colère, puis pleura. Jusqu'au moment où une infirmière et un médecin des urgences expliquèrent qu'ils n'auraient jamais pris de tels risques s'il n'y avait pas eu un pompier prêt avec une lance à haute pression car de l'autre côté tombait goutte à goutte de l’essence de la voiture. Le contact visuel qu’elle avait gardé avec lui et qu'il avait ressenti comme réprobateur pendant l'intervention signifiait beaucoup pour cette infirmière. Finalement, elle était reconnaissante envers le pompier pour sa présence. Elle exprima en outre encore d'autres choses très importantes, principalement en expliquant qu'elle était déjà rassurée quand elle avait appris par la radio, sur le chemin de l'intervention, que les pompiers étaient en route pour l'accident. Cela donnait quelque chose comme « si ce sont ces gars, ça ira! ». L'intervention du personnel de l'aide médicale urgente, entre autres les infirmières et les médecins ainsi dénommés, mirent le pompier «au niveau» de l'intervention thérapeutique. Il se sentit reconnu dans son travail qui, en effet, est parfois de nature passive.
Cet exemple illustre bien qu’un entretien de découplage après accidents majeurs devrait pouvoir se tenir toujours de façon multidisciplinaire au lieu de seulement au sein du corps
D'autres buts, tout aussi importants, de l’entretien de découplage sont la ventilation de la tension et des frustrations accumulées, la normalisation et la légitimation des réactions et sentiments interprétés, l'accomplissement de la restructuration cognitive (les cognitions négatives sont en partie remplacées -si possible -par des cognitions positives), la création d'un lieu, presque mythique, entre les compagnons d'infortune et l'identification des intervenants avec un risque élevé dans des circonstances irritantes. Après la participation au découplage émotionnel post-immédiat (endéans les quelques jours qui suivent l’intervention) la plupart des intervenants présents se sentent soulagés et rassurés. Dans les contacts qui s’en suivent ils nous disent – parfois par le biais de l’équipe de gestion de crises travaillant dans leur propre corps ou service – comment l’entretien les permet de mieux comprendre leurs réactions (durant et après), d’avoir une meilleure idée sur ce qui s’est passé et de voir plus clair dans les réactions de victimes, de leurs proches et de leurs propres collègues.
Interventions précoces et différées par des « paires supervisées »
Les entretiens de récupération et de découplage émotionnel semblent donc être un moyen effectif pour pourvoir à un dysfonctionnement prolongé après une intervention potentiellement traumatisante à condition que la discussion soit menée par les bonnes personnes au bon moment en utilisant une technique de communication adéquate, et que ces interventions se dérouleraient en plusieurs phases, échelonnées logiquement dans le temps, tout en tenant compte des souhaits des intervenants eux-mêmes. Nous pensons que beaucoup trop de techniques et d’interventions d’aide ou de soutien sont proposées par des « spécialistes » sans réellement tenir compte des souhaits du client lui-même : l’intervenant qui est l’expert en la matière, cherchant un cadre et des repères pour comprendre et donner du sens à son vécu. Nous avons parfois l’impression que seuls les professionnels ayant une expérience du terrain dans les services de secours et d’aide médicale urgente eux-mêmes comprennent et respectent pleinement ce besoin.
Les objectifs successifs (repris dans la liste ci-dessous) dépendraient alors en grande partie des souhaits exprimés par les intervenants durant les premiers contacts prévus dans l’immédiat après l’intervention traumatogène.
L’entretien de découplage émotionnel contient les éléments d'évaluation psychologique, de ventilation de sentiments, de reconnaissance, de normalisation et de légitimation des réactions et symptômes intervenants et d'auto-évaluation du fonctionnement de l'individu et du groupe.
L’entretien de découplage émotionnel vise les objectifs suivants :
- premièrement: arriver ensemble, avec tous les intervenants impliquées, acteurs de l'intervention, à une reconstruction précise de ce qui s'est réellement passé, mettre toutes les pièces du puzzle des personnes impliquées ensemble (reconstruction en maquette, au tableau, sur transparent, e.a.) pour arriver à un ensemble qui rend le rôle de chacun très clair ;
- deuxièmement: offrir la possibilité aux personnes impliquées de ventiler leur réaction émotionnelle en rapport avec l'événement et apprécier l'intensité de ces réactions, sans pour autant les explorer dans un stade précoce;
- troisièmement: offrir aux personnes impliquées la reconnaissance, le soutien, l'information et le calme par la discussion détaillée, la normalisation et la légitimation des changements (transitoires) dans leur vie et des symptômes ;
- quatrièmement: initier, stimuler et catalyser chez les participants leur propre capacité d'assimilation traumatique (d’élaboration du trauma) et les aider à retrouver la sérénité et la confiance (y compris leur sentiment de prévisibilité et de contrôle) dans l'environnement dans lequel ils vivent et travaillent ;
- cinquièmement: effacer le sentiment de détachement des personnes impliquées en soulignant la fraternité réciproque. Stimuler la solidarité et la communauté parmi les compagnons d'infortune des différentes disciplines (et au besoin soutenir aussi l'enveloppe sociale des « victimes »).
Le but principal est donc d'aider les gens impliqués, étant donné que la souffrance psychique est prolongée mais qu'ils peuvent apprendre à l'utiliser comme un « moteur » au lieu de se laisser piétiner par celle-ci. Tristesse, peine, angoisse, peur, colère et sentiments intenses sont des catalyseurs pour arriver à une élaboration saine du traumatisme. Ceci doit permettre aux intervenants de se découpler émotionnellement de ce qui vient de se passer pour pouvoir reprendre rapidement leur travail et leur rythme de vie normal. La prolongation de la souffrance peut, par après, parfois être ramenée à la conscience par un petit stimulus sans importance (surtout les odeurs) suffisant pour raviver tous les souvenirs.
Il y a aussi toute une série d’objectifs secondaires, plus dirigés sur l'individu. Ils contiennent, en premier, l'aide à la reconstruction cognitive au moyen d'une compréhension claire aussi bien des événements traumatisants que des réactions à ceux-ci.
Le monde des victimes peut bien se retrouver la tête en bas, mais ne doit pas y rester. Ensuite, la tension individuelle et de groupe doit être diminuée. Par-dessus tout, on doit diminuer le sentiment d'anormalité dont les victimes d'événements potentiellement traumatisants se souviennent, en leur laissant partager leurs sentiments avec plus ou moins les mêmes opinions et en leur expliquant qu'il s'agit de réactions normales à un événement ou une situation anormale.
On doit aussi essayer d'argumenter le soutien, la solidarité et la cohésion du groupe. On doit aussi préparer les victimes à des symptômes ou réactions qui pourraient apparaître plus tard et finalement identifier qui aura besoin de plus d'aide.
La forme de l’entretien de découplage émotionnel étant de l’aide collégiale (supervisée), les règles d'or suivantes doivent être respectées: si on est impliqué soi-même, on doit laisser l'accueil des collègues touchés aux autres. La supervision de l’entretien de découplage réside dans la surveillance et le soutien du processus ; donc la réunion de soutien de collègues entraînés (pour les collègues) doit être supervisé par un psychologue, un psychiatre ou un psychothérapeute. Un point essentiel dans le travail des Equipes de Gestion de Crise (en Europe et en Australie mieux connues sont le nom des Fire-Fighter & Medical Emergency Stress Teams, ou simplement les FiST - voir ci-dessous) est que ces personnes d'aide et de soutien de crise aient eux-mêmes eu une expérience de terrain chez les sapeurs-pompiers et de l’aide médicale urgente.
Le fait que les pairs entraînés, les personnes qui accueillent leurs collègues dans l’immédiat après une intervention traumatogène ou les « débriefeurs » soient aussi des intervenants a en outre encore un rôle important. Quand des interventions extrêmement choquantes sont discutées, on présentera durant la phase de reconstruction de l’intervention, dans la mesure du possible, des photos dures non censurées ou des films en rapport avec les activités d'assistance. Ce matériel de faits est très important pour compléter les lacunes a posteriori dans l'expérience de chaque intervenant impliqué qui, pendant l'intervention, fut souvent, partiellement sous l'influence d'une attention accrue pour certains stimuli et d’une «chute d’attention » pour d’autres (tunnel vision) dont on a déjà parlé ci-dessus, ou encore, si attristé dans l'activité, que beaucoup d'informations importantes pour l’élaboration du traumatisme se perdent. Ainsi, il est difficile pour les intervenants de se former eux-mêmes une image globale autour de l'événement. Il n'est pas donné à tout le monde de supporter les images d'intervention extrême sans même une préparation. Devant le repêchage d'un vieux corps en dehors du canal, le sauvetage d'une victime mutilée (enfants), l'enlèvement de restes humains en dehors d'une maison, d'un véhicule ou d'entre les rails d'un train, ce ne serait pas la première fois qu'un professionnel « d'un secteur plus doux », même prévenu, devrait vomir ou quitter la salle pendant ou après une discussion, entre autres à cause de la cruauté des informations qu'il aurait vues ou entendues pendant cette discussion. On ne pourrait pas se permettre que la personne qui accueille et accompagne au stress en soit la victime, si elle reçoit des intervenants après une catastrophe !
Un autre avantage d'être soi-même pompier ou sauveteur pour être « débriefeur », est que, durant la discussion d'accueil, le temps précieux n'est jamais perdu parce que celui-ci doit fournir une explication sur l'intervention du pompier ou de l'ambulancier et dire quelles procédures ou matériels doivent être normalement utilisés. Les intervenants « débriefeurs » doivent vivre bien eux-mêmes et avoir ne serait-ce que quelques années d'expérience de ce travail et savoir où se trouvent parfois les points clés. En plus, dans un corps de sapeurs-pompiers, il est parfois essentiel pour les initiés de connaître les alliances dans le groupe: les sapeurs-pompiers les plus âgés, les plongeurs, les spécialistes du gaz, les ambulanciers, l’équipe « hauts risques », e.a. Pendant une discussion, il peut être très important d'avoir ces informations concernant « les alliances naturelles dans le groupe ».
C'est là que se trouve le seuil, souvent très bas, de participation à un entretien de découplage, à cause des participants impliqués, parce que ces derniers savent que les « débriefeurs » sont de la même « race » qu'eux et sont pénétrés du « sentiment des sapeurs-pompiers », que les « étrangers » ne peuvent pas vraiment imaginer. Ainsi, un jeune cadre dynamique dans un costume trois pièces n'arrive pas en papotant, son téléphone portable à la ceinture, dans une caserne de sapeurs-pompiers ni un psychiatre ou psychologue avec son tablier blanc, signe de pouvoir et d’expertise... On supporte mieux un sentiment de reconnaissance, avec des marques extérieures de pompier ou d’acteur de l’urgence ayant une crédibilité de terrain. Cela ne signifie naturellement pas que la personne doit porter ouvertement ses grades de sapeur-pompier. S'ils sont par exemple reconnaissables comme officiers, ils peuvent, sans aucun doute, atteindre l'opposé de ce qu'ils veulent, comme avocat du diable naturel. Les membres des FiST portent par exemple les vêtements ordinaires des sapeurs-pompiers et se reconnaissent des autres intervenants – aussi bien sur le terrain qu’après durant les activités de soutien - par un badge qu'ils portent et éventuellement un sweat avec le logo FiST imprimé.
Construction d’un réseau d’intervention d’équipes de gestion de crises dans les services de sapeurs-pompiers et d’ambulanciers
Le modèle des Fire-Fighter & Emergency Medical Stress Teams
La première activité d’un corps de sapeurs-pompiers impliqué réside dans la prise de contact avec les responsables FiST de la région concernée. Est ensuite fixée la date d’un exercice de corps pour aborder avec l’ensemble du groupe le thème du stress traumatique dans la pratique.
A la fin de ces échanges d’introduction et d’exploration, des membres d’une équipe de gestion de crises seront nommés par leurs collègues. Cette sélection – appelée « sélection 360° » - se fait en trois étapes : choix par les participants, ratification par le commandant, ratification par les responsables du réseau FiST (après un processus de sélection par contact et interview personnalisée). Les questions qui président au choix sont entre autres de savoir quel collègue du corps de sapeurs-pompiers et/ou d’ambulanciers serait apte à assumer cette fonction de confiance, intervenant de première ligne, et quels seraient les collègues les plus volontiers sollicités en cas de problème.
La force de cette procédure de sélection réside en premier lieu dans le mandat confié par des collègues et par le commandant de travailler sur des problèmes délicats. De plus, il est important d’écarter des candidats qui, spontanément ou officiellement, sont concernés par les tâches d’occupation de première ligne. Nous pensons entre autres aux dirigeants du corps qui prennent en main des tâches d’enquêtes administratives sur les accidents. En effet, le débriefing collectif ou individuel exige de pouvoir se dire des choses absolument confidentielles en toute franchise, qui ne sauraient en aucun cas être réutilisées ultérieurement pour les besoins de l’enquête administrative.
L’aumônier ou d’autres aides spirituelles ont certes leur mot à dire en matière de soutien ; toutefois, ce ne sont pas les personnes idéales pour faire partie des équipes de gestion des crises au sein des sapeurs-pompiers.
Chaque équipe doit avoir obtenu l’aval du chef de corps pour la mise en place d’un système d’aide aux collègues. Pour des raisons stratégiques – notamment comme signe de reconnaissance de la problématique – il est judicieux d’avoir dans l’équipe un représentant de la direction du corps.
Il faut être clair d’emblée sur le fait que les collègues sélectionnés ne doivent pas se mettre au premier plan sur la base de leurs propres expériences traumatisantes passées. En cours de formation resurgiront parfois des restes de souvenirs difficiles non résolus et encore sensibles, ce qui est normal. Pourtant, ces émotions ce doivent entraver ni la formation, ni le travail ultérieur avec les collègues. Les responsables de FiST veulent notamment à tout prix éviter que des secouristes acceptant ce rôle de confiance et d’intervenant psychosocial auprès de leurs collègues s’abîment en aidant autrui.
L’expérience montre que la sélection d’intervenants psychosociaux parmi les pairs, telle qu’elle fut expliquée ci-dessus, ressortent le plus souvent des collègues « de premier soutien psychologique » sérieux. Les intervenants qui travaillent ensemble dans des circonstances parfois dramatiques se connaissent souvent mieux que leur propre partenaire ! Un dernier avantage encore de ce modèle est qu’il ne nécessite pas de grandes explications ni de budgets considérables.
Ce n’est que lorsque le feu vert est donné à tous les niveaux que la démarche se met en place.
Les membres sélectionnés sont réunis avec ceux d’autres équipes de gestion de crises en groupes de douze à quinze personnes, et ce dans un centre de formation isolé quelque part dans la nature. Le but est de former ensuite un réseau régional d’équipes FiST, dont le travail sera présenté plus loin dans le texte.
Le programme de base cherche à équilibrer formation de groupe (team building), formation théorique, exercices pratiques (psychodrame, jeux de rôles, promulgation, etc.) processus de croissance individuelle et activités collectives informelles.
Le futur intervenant psychosociale de première ligne découvre comment assister les victimes traumatisées selon un style qui lui convient et développe ses capacités d’introspection.
Après le week-end de formation de base, les jeunes intervenants FiST suivent une série de cours d’approfondissement sur une période d’une année. Le groupe qui a suivi l’ensemble de la formation travaillera l’année suivante à la construction de l’équipe sous la supervision permanente des formateurs du FiST. Ils se retrouvent tous les trois mois autour de sujets prédéterminés.
La première tâche qu’ils reçoivent après leur week-end de formation est la mise sur pied d’un plan d’action pour informer et sensibiliser leurs collègues, par le biais de leur propre brochure sur le thème du stress traumatique chez les sapeurs-pompiers et/ou les ambulanciers.
Six mois plus tard, les intervenants FiST retrouvent leurs formateurs et superviseurs pour préparer la construction d’un système de partenariat ainsi que la mise en place d’un procédure d’annonce des mauvaises nouvelles.
La rencontre suivante permet de discuter et d’évaluer les scénarios d’information ébauchés sur l’aide en cas de crise psychologique (procédure d’opération standard).
Enfin, une année plus tard, un exercice de synthèse mettra à l’épreuve les connaissances acquises : une calamité fictive mais réaliste est annoncée depuis le staff FiST national dans l’un des centres concernés, ce qui déclenche la procédure complète d’intervention ; le déroulement est ensuite évalué par les formateurs FiST.
Si au cours de l’année de formation, des événements choquants et/ou traumatisants devraient survenir dans la région dont l’équipe FiST est en train de se construire, c’est la coordination régionale du FiST qui organise la prise en charge psychosociale nécessaire. Les membres FiST encore en formation seront appelés dans la mesure du possible comme observateurs ou comme auxiliaires, afin de se familiariser avec leurs fonctions.
Même au terme de leur formation, les membres FiST continuent à se retrouver tous les trois mois au staff régional pour se perfectionner et entretenir la flamme de leur motivation.
La formation des membres FiST comporte donc trois volets que nous rappelons brièvement : 1) exercice général de corps, sélection des membres de l’équipe ; 2) week-end résidentiel de formation ; et, 3) formation complémentaire – une rencontre tous les trois mois durant une année.
Structures de travail des Fire Fighter & Emergency Medical Stress Teams
La structure des staffs FiST est identique dans chaque région couverte par un réseau d’intervention régionale ; aussi bien les staffs nationaux que régionaux disposent des mêmes fonctions, respectivement : un secrétaire, un superviseur, une coordinateur ou une équipe de coordination, un (ou plusieurs) conseiller(s) médica(l)(aux) et un trésorier. Les fonctions liées à chacun de ces postes sont brièvement décrites ci-dessous :
-Le secrétaire est toujours un commandant de corps de sapeurs-pompiers et sert de plaque tournante pour les échanges entre le FiST et l’extérieur. Les responsabilités suivantes lui incombent : 1) relations publiques ; 2) en cas de situation difficile ou d’intervention traumatogène, contacts avec les corps de sapeurs-pompiers sans FiST ; 3) organisation des rencontres de formation continue tous les trois mois ; 4) relations avec le staff national ; 5) relations avec les organisations externes au service d’incendie (hôpitaux, Croix Rouge, centres d’hygiène mentale, etc) ; et, 6) liens avec la presse, représentant devant les instances officielles.
-Le superviseur est un professionnel dans le domaine de la psychologie (psychologue, psychiatre, thérapeute, e.a.). Les compétences de base de chaque superviseur régional sont les suivantes : 1) surveillance du travail du FiST régional et de la qualité des interventions de soutien précoces et différées ; les membres FiST sont eux-mêmes « briefés » et « débriefés » après chaque intervention, même immédiatement si nécessaire ; 2) surveillance de la déontologie et de la philosophie du FiST ; 3) relations avec les milieux professionnels d’assistance ; 4) enseignement au niveau de la formation de province, responsabilité des soirées d’information ; 5) élaboration du programme de la formation continue des équipes ; et, 6) approfondissement constant des connaissances acquises.
-Les médecins du FiST sont en principe des médecins d’urgence reconnus qui surveillent l’aspect médical des situations traumatiques : 1) consultation médicale pour le travail du FiST au niveau de la région ; 2) conseils psycho-médicaux en cas de problèmes traumatiques spécifiques ; 3) personnes de confiance pour les membres des corps et les débriefeurs ; 4) conseils et soutien en matière d’exercice physique comme antidote du traumatisme ; et, 5) disponibilité pour assurer eux-mêmes des interventions auprès des différentes catégories d’impliqués traumatisés.
-Le coordinateur du FiST fait partie des cadres d’un corps de sapeurs-pompiers doté de moyens financiers, d’un bon équipement de télécommunication et de multi-média ; il est la personne-clé du bon fonctionnement de l’ensemble au sein d’une région. Certaines régions disposent même de plusieurs coordinateurs ou d’une équipe, ce qui permet une alternance. Lorsque la catastrophe dépasse les limites d’une région, et exige l’engagement de moyens appartenant à un niveau départemental ou national, il est évident qu’un seul coordinateur ne suffit plus. Une infrastructure adéquate en moyens de télécommunication et en multi-média est alors indispensable. Les responsabilités du coordinateur (ou de l’équipe de coordination) sont donc les suivantes : 1) mise en place d’une équipe après la procédure de prise de contact ; 2) contrôle des débriefeurs au niveau de la région ; 3) contrôle des rapports de chaque intervention FiST ; 4) disponibilité permanente (accessibilité) comme exigence centrale ; 5) fonction d’antenne de garde de la région pour répondre aux besoins de procédure d’urgence ; 6) travail en étroite collaboration avec le secrétaire FiST ; 7) initiateur et responsable de la mise en marche du staff au niveau national ; et, 8) coordination des horaires pour l’organisation d’une intervention FiST, en collaboration avec le secrétaire et le corps de pompiers impliqué.
-Le trésorier effectue les tâches suivantes : 1) prise en charge des aspects financiers et statutaires du travail du FiST ; 2) préparation du rapport annuel des activités en collaboration avec le secrétaire.
Le staff national est d’une structure similaire mais situe les tâches à un niveau plus élevé. La seule fonction qui vient s’ajouter est celle de conseiller juridique. Il est évident que tout travail autour d’événements traumatogènes et d’accidents de grande envergure relève aussi du domaine juridique. Pouvoir assurer la sécurité et le cadre légal de tout travail auprès des victimes est une tâche extrêmement importante.
Les scénarios des FiST régionaux déterminent le type d’intervention pour lequel il faudra solliciter le staff national, principalement en ce qui concerne la supervision de l’intervention sur place ou l’attitude face à une situation particulièrement difficile.
Le FiST compte un certain nombre de catégories ; ce sont essentiellement :
-les débriefeurs internes du FiST qui ont suivi la formation de base du week-end, puis les quatre séances de consolidation prévues tous les trois mois. Ils travaillent spontanément et de façon informelle dans leur groupe de sapeurs-pompiers et/ou d’ambulanciers ; selon la demande, ils décident eux-mêmes d’organiser (guidés dans ce travail par les structures présentées ci-dessus) des entretiens. Lorsque l’intervention traumatogène touche un grand nombre de collègues ou implique des membres d’autres services, il en réfèrent la prise en charge au staff régional, qui agira en fonction des corps impliqués ;
-les débriefeurs externes du FiST, qui ne font pas partie de l’organisation et ne sont pas pompiers ; ils appartiennent aux sociétéss de transports publics, compagnies de chemin de fer, services sociaux de la ville, hôpitaux, etc. et sont les personnes de contact au cas où leur organisation serait impliquée avec les pompiers dans une situation traumatogène ;
-les antennes-FiST : ce sont des sapeurs-pompiers et des ambulanciers qui ont suivi la formation de base, mais pas les cours de perfectionnement. Ils sont disponibles pour aider à l’organisation ou pour (aider à) effectuer les premiers soins psychologiques après incidents critiques.
Rappelons encore la régle d’or qui fait qu’on ne peut être débriefeur après un stress traumatogène si on a été soi-même impliqué ; c’est alors à une autre équipe FiST d’intervenir. La présence d’une personne ou d’une équipe extérieure évite de charger le debriefeur des tensions et rancunes internes au groupe.
Finalement, il ne faut pas perdre de vue LA caractéristique centrale du réseau d’intervention lors de situations de crise que sont les FiST : CHAQUE intervenant-debriefeur appartenant au FiST est lui-aussi intervenant de terrain expérimenté, sapeur-pompier, ambulancier ou médecin/infirmier urgentiste. Dans cette optique le Fire Fighter & Emergency Medical Stress Team (FiST) est le seul réseau d’intervention d’aide aux intervenants choqués et/ou traumatisés au monde comptant une première, deuxième et troisième ligne – travaillant de façon non-commerciale et regroupant que des intervenants des terrain expérimentés, volontaires ou professionnels, dont certains sont des spécialistes du stress et du trauma ...
Conclusion et recommandations
Nous avons essayé dans ce chapitre d’introduire le lecteur au monde spécifique des intervenants lors de situations d’exception ainsi que de créer une image de la pratique et de mentalité des intervenants de terrain : sapeurs-pompiers, ambulanciers, médecins urgentistes, équipes d’identification de corps et infirmiers/infirmières. Nous avons aussi couplé la notion d’événement à potentiel traumatisant (traumatogène) au monde spécifique des intervenants en essayant de motiver la nécessité d’un soutien psycho-émotionnel, tant dans les heures qui suivent l’intervention en question, que plus longtemps après.
Il semble principalement que les services de sapeurs-pompiers soient un milieu très fermé où les debriefings psychologiques et les conseils en matière de gestion d’événements psychotraumatisants exigent une approche appropriée. Il est clair que les sapeurs-pompiers et les ambulanciers veulent être soutenus et entendus par les intervenants qui ne les considèrent pas comme victimes mais peuvent les aborder à partir de leur propre pratique couplée à un entraînement permanent dans le domaine des expériences traumatiques.
La prévention de traumatismes psychologiques et/ou de syndromes post-traumatiques ne semble pas être l’unique justification de l’élaboration de structures de soutien et d’aide adéquats. De plus, la mise en place de procédures fournissant une aide professionnelle serait peut-être souhaitable dans certains cas mais nous pensons qu’il faudrait en premier lieu investir dans une première ligne d’aide collégiale, prenant en compte la prévention primaire, et travaillant dans la deuxième ligne tout en étant supervisés par des « psychologues et psychiatres de terrain » qui eux peuvent assurer une éventuelle aide de troisième ligne (prévention tertiaire, curative et psychothérapeutique).
Le plus grand défi réside dans le fait qu’il faudrait arriver à combler « le trou noir » qui tombe souvent entre le moment d’une intervention traumatisante et le moment auquel un premier soutien est offert. Le monde scientifique peut bien essayer de prouver que les « débriefings psychologiques » sont potentiellement nuisibles et exiger des techniques validées scientifiquement mais les chercheurs devraient comprendre aussi que de nos jours de loin la plupart des intervenants reviennent toujours de leurs interventions traumatogènes sans aucune forme d’aide ou de soutien institutionnalisé. Il faudrait donc absolument arrêter le débat public « pour ou contre le débriefing psychologique » et investir dans des études écologiquement valides.
Nous avons fortement l’impression que des « spécialistes du trauma » partout au monde ont été trop vite à promouvoir en tout azimuts le débriefing psychologique comme une intervention d’aide et de soutien « passe-partout », tant pour des victimes directes que pour leurs proches et/ou les intervenants qui leur sont venu au secours. Ainsi ils ont complètement oublié que le « critical incident stress débriefing » de J.T. Mitchell (1993) fait partie intégrante de toute une gamme de possibles activités de soutien mieux connus sont le nom de « critical incident stress management ». Le débriefing psychologique – adapté dans ce chapitre comme un entretien de découplage – doit donc être vu comme une forme de prévention secondaire (prévention de problèmes psychosociaux post-traumatiques) auprès de victimes tertiaires. Organiser ce genre de « débriefing » avec des victimes de catastrophe n’a donc que très peu de sens et contient même les risques d’aggraver leur situation. D’ailleurs, aucune victime était « briefée » d’avance qu’une catastrophe allait avoir lieu …
L’aide aux victimes de catastrophes – tant les victimes directes (appelés victimes primaires dans l’introduction de ce chapitre) que leurs proches (victimes secondaires) – est une affaire de professionnels et ne correspond pas au soutien que doivent recevoir les intervenants. Comparer les résultats d’études en matière d’efficacité du débriefing psychologique chez ces différents groupes a donc très peu de sens.
Il ne faut donc certainement pas supprimer « les débriefings psychologiques » mais plutôt réfléchir à la diversité des interventions de l’aide urgente psychosociale et trouver une terminologie adéquate (et francophone ...) afin de mieux décrire cette chaque intervention vise réellement. Laissons le terme « débriefing » pour des entretiens qui correspondent réellement à ce terme : le « débriefing opérationnel » tel qu’il était conçu initialement en milieu militaire.
Une intervention précoce – appelée ici l’entretien de récupération émotionnelle (désamorçage et ventilation) – après une intervention à potentiel traumatisant est plus que nécessaire, mais elle devrait surtout viser la récupération tant physique qu’émotionnelle et éviter toute forme d’exploration émotionnelle précoce ni déclencher une abréaction collective. Cette première intervention devrait avant tout réduire le taux d’excitation corporelle présent et permettre une première restructuration cognitive.
Une intervention différée – appelée ici l’entretien de découplage émotionnel – dans les jours qui suivent aura alors pour objectifs principaux de : (1) continuer à apporter un soutien psycho-émotionnel ; (2) continuer la psycho-éducation (légitimer, normaliser, apprendre des styles de coping et de psycho-hygiène, etc) des intervenants impliqués ; (3) de stimuler et/ou catalyser l’élaboration saine de l’intervention traumatogène permettant aux intervenants d’intégrer l’intervention en question dans leur vécu et leur « fable personnelle ».
Ceci implique non seulement une vision cohérente entre les « spécialistes du stress et du trauma » mais aussi un leadership humain au sein des corps d’intervenants et de services de secours. Nous sommes convaincus que la figure centrale par excellence, sans quoi le soutien dans les crises psychologiques des interventions potentiellement traumatisantes ne serait pas possible, est le commandant des sapeurs-pompiers impliqués ou le médecin directeur de l’aide médicale urgente. Il semble donc à ce niveau, complètement dominé par la « technicité du métier » que beaucoup d'informations et de sensibilisations doivent encore être faites.
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[1]Pour une analyse plus approfondie de la traumatisation indirecte des intervenants lors de situations d’exception nous conseillons la lecture du chapitre consacré aux bases de la traumatisation indirecte dans l’ouvrage « Les traumatismes psychiques » (DE CLERCQ & LEBIGOT, 2001).
[2]Pour une description et une discussion détaillée du travail des Fire-Fighter & Medical Emergency Stress Teams nous voudrions conseiller le lecteur de consulter nos publications antérieures dans des revues de sapeurs-pompiers et d’ambulanciers (e.a. Urgence Pratique, le Journal des Sapeurs-Pompiers Suisses, le Sapeur-Pompier belge et l’ANPI Magazine).